« C’est un système raciste… Ils nourrissent leur haine sur notre dos »

Le CRA de Toulouse se remplit progressivement, les arrestations suite aux contrôles au faciès ont repris et les sortants de prison continuent d’être enfermés au CRA pour subir la double peine. On retrouve peu à peu la situation d’avant le Covid, les différents secteurs se remplissent, dont celui des femmes.

Les audiences continuent d’avoir lieu au CRA en visio depuis la pandémie, ce qui empêche la présence du public et détériore le contact que peut avoir la personne avec son avocat et le juge. La publicité des débats et le face à face ne sont plus assurés dans cette parodie de justice. L’État cherche sans doute à pérenniser ce nouveau système et limiter ainsi les moyens de la défense.

Les visites sont possibles, la PAF a installé dans les parloirs un film plastique au milieu de la table comme séparateur entre visiteur·euse·s et prisonnier·e·s. Une seule personne peut entrer dans le parloir pour chaque visite.

 

Témoignages de prisonniers

J. : « Je suis sorti de Seysses et après 2 mois dehors, 2 mois de galère à cause du Covid, pour subvenir à mes besoins j’ai squatté…Ils m’ont arrêté, garde à vue et direct le CRA. ça fait 18 ans que je suis en France, je suis père d’un enfant français…J’avais une carte de séjour à Paris et quand je suis arrivé à Toulouse, elle était périmée et ils ont commencé à me donner des récépissés. À cause d’une bêtise j’ai fait de la prison, à partir de là ils ont décidé de pas renouveler mes papiers et j’ai reçu une OQTF sans délai. Ils nous traitent pire que de la merde. Ils savent qu’ils n’ont pas de solutions avec nous…C’est de la répression, un système raciste, c’est des fachos qui tiennent le pouvoir, ils nourrissent leur haine sur notre dos, j’ai bien compris tout ça, leur racisme avec moi ça a duré trop longtemps, j’en peux plus, je l’ai dit à la juge, si vous voulez que je quitte la France, laissez-moi partir, pourquoi vous m’enfermez… La police ici c’est la hogra surtout avec les plus jeunes, ils provoquent surtout ceux qui ne sont pas en France depuis longtemps et qui ne parlent pas bien le français… »

R. :   » Ils m’ont ramené de Corse dans un petit avion de 9 places, un avion noir avec 5 policiers dedans, il venait de Paris jusqu’à Bastia pour m’amener au CRA de Toulouse. J’ai rien compris, je leur ai demandé vous êtes venus que pour moi ? Pourquoi de Corse à Toulouse ? À la sortie de la prison, 2 policiers m’attendaient pour m’emmener en avion ! J’ai été condamné à 30 mois de prison pour travail dissimulé et harcèlement, j’ai fait 21 mois ferme. Le proprio où je faisais les travaux a commencé à me galérer pour me payer et m’a mis le harcèlement sur le dos. Ça fait 25 ans que je suis en France, je travaille, j’ai une famille, des enfants et je suis enfermé ici, j’ai 44 ans… C’est dégueulasse ici, ya pas d’hygiène, la femme de ménage doit faire 17 chambres en 25 minutes, elle peut pas la pauvre, alors avec un autre gars on le fait nous-mêmes mais y’a même pas d’eau de javel et ça pue, la nourriture est dégueulasse, je dépense beaucoup d’argent aux distributeurs et je paye pour ceux qui n’ont pas d’argent, on peut pas bouffer sinon…Les jeunes sont shootés aux médicaments, le médecin les bourrent ils sont comme des momies…On peut pas acheter de shampoing, de savon, de quoi se raser, l’OFFI ne veut pas, elle donne des dosettes de shampoing…

M. :  « J’habite l’Espagne depuis 6 ans, je suis arrivé en France en 1987, j’ai vécu à Paris 15 ans puis Toulouse… Ils peuvent pas m’expulser. J’ai déjà été enfermé ici dans le centre à Toulouse. Là ça fait 10 mois que je suis enfermé depuis mai 2019, j’ai fait 3 mois de prison à Albi parce-que je vendais des cigarettes… Ensuite pour une bagarre, j’ai été arrêté et j’ai pris 7 mois fermes, j’ai une interdiction en France* mais j’habite en Espagne… Ils m’ont sorti de Seysses plus tôt à cause du virus et j’ai été amené au CRA et ça fait 2 mois…. Ils me connaissent à Toulouse, même les policiers m’appellent pour me demander si je peux leur vendre des cartouches de cigarettes… »

(*Interdiction de Territoire Français)