Au centre de rétention de Toulouse, des vitres ont été installées début octobre dans tous les parloirs sauf celui des familles, empêchant tout contact physique entre les prisonnier·e·s et les visiteur·ses et rendant toujours plus carcéral l’environnement des détenu·e·s.
Alors que les flics empêchent aux visiteur·ses arbitrairement d’amener des produits secs aux prisonnier·e·s, C. dénonce des méthode de torture dans le CRA : refus d’accès aux soins, alarmes incessantes, manque de nourriture, douches froides…
Et tout ceci alors que comme C, de nombreux·ses ressortissant·e·s algérien·ne·s sont toujours enfermé·e·s au CRA, malgré le refus de l’Algérie de délivrer des laissez-passer !
Derrière les barbelés du CRA, les humiliations et violences physiques et psychologiques des flics de la PAF sont quotidiennes, en témoignent deux prisonniers.
Témoignage de R, 24 octobre 2024, enfermé depuis 30 jours et prolongé pour 30 jours
« J’ai perdu 10 kg en 3 semaines, ils nous traitent comme des animaux, ils donnent n’importe quoi à manger, tu manges ou tu manges pas tu fermes ta gueule. J’étais en prison à Chateaudun 16 mois ferme et 2 mois en semi-liberté à Poitiers. Ils m’ont donné une IRTF. Ils ont gardé mon passeport, ils ont pas voulu me le rendre. A Poitiers j’ai fait une demande de titre de séjour. Ils m’ont ramené au CRA, le jour de ma sortie, je savais pas. La préfecture de Poitiers m’a fait amener ici à Toulouse loin de ma famille qui est à Chinon. J’ai pas compris pourquoi ils m’ont éloigné de ma famille.
J’ai fait 16 mois enfermé mais jamais j’ai passé un mois comme ça, ici c’est le plus long. Y’a pas quelqu’un ici qui n’a pas dit la prison c’est mieux que le centre.
Le parloir est vitré ici, depuis 2 semaines, je peux pas être en contact avec mes enfants. Si ma famille vient, elle doit prendre une chambre d’hôtel, 12h aller-retour pour 30 mn de parloir. J’ai payé avec la prison, maintenant c’est mes enfants et ma femme qui doivent payer en plus.
Les policiers ont des caméras sur leur veste, c’est nouveau, en 2022 au CRA de Rennes, ils avaient pas de caméras.
Ils provoquent les gens juste comme ça, si on parle, obligé ils ramènent des gens au mitard, les gens esquivent, on ferme notre gueule pour que ça passe avec eux. C’est la faute de notre pays, dans notre pays en Tunisie, n’importe quel étranger on le considère bien, il a du pouvoir. En France n’importe quel citoyen français, il a la loi pour lui mais nous non, nous on reste des étrangers.
Y’a 2 semaines suis parti au docteur, j’ai annulé le rdv pour pas péter un plomb avec lui. Il me dit « de quel origine vous êtes ? Pourquoi vous rentrez pas dans votre pays c’est mieux qu’ici, votre président est d’accord avec la loi européenne*. »
*R fait ici référence aux accords dits « bilatéraux » entre la Tunisie et l’UE, celle-ci octroyant des aides à la Tunisie dans le but d’endiguer les départs des migrant·es vers l’Europe.
Témoignage de C, 02 octobre 2024, enfermé depuis 37 jours
“J’ai souffert ici je connais personne”, je ne me sens pas bien.
Tous les jours les alarmes incendie, pour rien tout le temps, c’est de la torture morale j’te jure, c’est un système pour te prendre la tête, te rendre fou »
C. souffre des dents depuis avant son arrivée au CRA, il s’en plaint à chaque visite médicale mais depuis son premier jour les médecins lui donnent un rdv pour arracher ses dents qu’ils repoussent toutes les semaines.
« Le médecin m’a donné du Tramadol. C’est mieux pour mes dents. Ici, ils me donnent du Dafalgan, ça me fait rien. Ils me disent faut attendre 3 semaines, même si j’ai mal, la visite du médecin c’est que le vendredi. Faut attendre le prochain vendredi. »
« La douche est froide, on a rien. Pas d’oreiller, j’ai demandé des vêtements, ils m’ont dit : C’est trop tard, fallait demander le premier jour. »
« La police insultent et frappent les jeunes, surtout ceux qui sortent de prison, ils les provoquent »
« On a faim. La nourriture est dégueulasse, il faut se boucher le nez pour manger. Ils te donnent du pain, mais un tout petit peu. La nourriture n’est pas chaude. La viande n’est pas halal, on la mange pas. Et le lendemain pareil, ils ramènent encore de la viande.
Ils nous laissent pas rentrer du pain dans les chambres. On mange à 18h, 19h, on a faim, jusqu’au lendemain matin. »