La répression coloniale à Mayotte

Table ronde organisée à la Chapelle, Toulouse, le 14 mai 2023

Un podcast à retrouver sur Spectre.

Après le début de l’offensive coloniale appelée opération Wuambushu, à Mayotte, en avril 2023, les intervenant.e.s de cette table ronde détaillent les actions de l’État français contre les étranger.e.s dans le cadre de cette opération et abordent plus généralement la politique coloniale menée par la France dans le département de Mayotte.

Ce podcast propose de revenir sur cette journée d’action en donnant à entendre :
– Une introduction à l’histoire coloniale de Mayotte et des Comores et à l’impérialisme français par un militant de Révolution Permanente ;
– L’altérité entre Mayotte et les Comores par Djamila, une personne mahoraise étudiante à Toulouse ;
– Les politiques migratoires spécifiques à Mayotte, la gestion coloniale des populations par un militant du collectif Toulouse Anti CRA ;
– L’opération Wuambushu et les actions en justice menées par un groupe d’avocates parti à Mayotte en avril par une membre du Gisti ;
– Les violences institutionnelles dans l’accès à la santé à travers la lutte contre le VIH par un membre de l’association Grisélidis.

Journée de rencontres contre les politiques anti-immigration

A la Chapelle, le dimanche 14 mai, venez participer à la journée contre les politiques anti-immigration pour s’informer et lutter

13h-14h30 réunion publique : états des lieux des politiques et des luttes

15h-16h30 table ronde : la répression coloniale à Mayotte

15h-18h ateliers, tables : LGBTI, santé

17h-18h atelier : droit des étrangers.ères pour les nul.le.s

18h30-20h Assemblée générale : organiser les luttes

20h-22h repas & boum

Bar et grignotage toute la journée !

Prise de parole au rasssemblement du 29 avril contre l’offensive coloniale à Mayotte et le projet de loi anti-immigration

Le gouvernement a annoncé le report de la loi Darmanin à l’automne. Même si ce projet est reporté, il ne sera pas abandonné.

Il a pour objectif de renforcer l’exploitation des travailleurs et travailleuses immigrées en créant des titres de séjour précaires pour des emplois en bas de l’échelle sociale. Le renouvellement de ces titres dépendra des besoins en main d’œuvre du patronat. Ces titres viennent organiser le contrôle des personnes étrangères corvéables puis expulsables.

Pour pallier au délabrement du système de soin sans avoir à répondre aux revendications des personnels soignants, la loi prévoit une carte de séjour pluriannuelle de santé, mais qui maintient les personnes étrangères comme aujourd’hui dans la précarité : sans reconnaissance des diplômes, pour des salaires moindres et à des postes spécifiques qui sont mobiles sur tout le territoire. C’est un pillage de la main d’œuvre qualifiée à l’étranger, formée aux frais des pays d’origine, essentiellement d’Afrique subsaharienne et du Maghreb, qui manquent déjà de médecins.

Le projet de loi a aussi pour objectif de soumettre les personnes. Elle prévoit le refus ou le retrait des titres de séjour sur la simple base du comportement, en invoquant « le respect des principes de la République ». Ce fourre-tout sans contours des principes accroît encore le pouvoir discrétionnaire des préfectures, et ce sont avant tout les musulmans et les musulmanes qui sont à nouveau ciblés, cette loi est un pas de plus dans la mise en œuvre de l’islamophobie d’État. De même, l’obsession assimilationniste s’intensifie en prévoyant d’exiger la maîtrise de la langue française pour les régularisations.

Enfin, le projet de loi a pour objectif de permettre plus d’enfermements et plus d’expulsions. Il s’attaque aux quelques catégories de personnes aujourd’hui protégées de l’expulsion. Pour retirer ou ne pas renouveler un titre, le projet renforce l’usage de la « menace grave pour l’ordre public », notion suffisamment vague pour laisser le champ libre aux préfectures. Il diminue le nombre de recours possibles contre l’expulsion, et renforce la double peine.

Mais il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agira de la 30e loi anti-immigration en 40 ans et ce n’est pas seulement contre elle, mais contre toute la politique migratoire de l’État qu’il faut lutter.

Car aujourd’hui déjà, les personnes étrangères sont traquées partout : aux frontières, au travail, dans la rue. Elles doivent quotidiennement se confronter à la police et aux politiques racistes mises en place depuis des années contre les immigrées. Ces violences d’État sont héritées des pratiques coloniales et du code de l’indigénat : la limitation de circulation, l’enfermement administratif et les déportations.

Les personnes sans papiers peuvent être arrêtés et se retrouver en centres de rétention administrative, les CRA. Dans ces prisons pour étrangers et étrangères, les personnes sont enfermées jusqu’à 3 mois en vue d’être expulsées. Mais toutes les personnes ne sont pas expulsables, et l’enfermement poursuit aussi un autre objectif qui est de punir et soumettre une partie de la population, de mater les personnes afin qu’elles s’invisibilisent et qu’elles ne se rebellent pas face aux patrons qui les exploitent.

Les prisonnières et prisonniers des CRA luttent quotidiennement contre les violences de l’enfermement, les violences policières, les violences médicales et contre l’expulsion, que ce soit par des évasions, des incendies, des grèves de la faim et des refus de vol. Les personnes qui se rebellent et luttent sont régulièrement envoyés à la maison d’arrêt de Seysses. À Toulouse, de nombreuses personnes se retrouvent en circuit fermé entre le CRA et Seysses. Rendons visible leurs luttes et soutenons les prisonniers et prisonnières.

L’État est en train de construire de nouveaux CRA partout sur le territoire, en 2027 le nombre de places aura triplé en 10 ans. Il construit aussi partout de nouvelles prisons, avec 15 000 nouvelles places d’ici 2027. Il y a à Toulouse le projet d’une nouvelle maison d’arrêt, à Muret, en plus de celle de Seysses.

S’il y a plus de 40 000 personnes enfermées par an dans les CRA sur l’ensemble du territoire, plus de la moitié le sont sur la seule île de Mayotte, territoire colonial où la violence d’État se déchaîne.

Car nous sommes ici aussi pour dénoncer l’offensive coloniale Wuambushu, à Mayotte, ou l’État s’est donné pour objectif de détruire en deux mois 10% des cases et d’expulser jusqu’à 300 personnes par jour.

Mais à Mayotte, l’expulsion des personnes étrangères, essentiellement des comoriens et des comoriennes, est toute l’année industrielle. L’État fixe à la préfecture des objectifs d’expulsion de 30 000 personnes par an, c’est à dire 10% de la population de Mayotte. Il s’agit de transferts forcés de population. Mayotte représente les 3/4 des expulsions pour l’ensemble du territoire français et les personnes qui ne sont pas expulsées constituent une main d’œuvre exploitée.

Mayotte est restée illégalement territoire français à l’indépendance des îles des Comores en 1974 pour que la France conserve ses intérêts dans l’océan indien. La France a également déstabilisé les Comores indépendantes avec des coups d’État et des assassinats de présidents menés par le mercenaire de la Françafrique, Bob Denard.

Depuis que la France a instauré le visa Balladur en 1995, plus de 20 000 personnes sont décédées en tentant la traversée, alors qu’auparavant, les familles ont toujours circulé d’île en île. C’est un même peuple, avec les mêmes langues et une même religion, l’islam.

À Mayotte, le régime dérogatoire propre aux colonies permet à l’État d’attribuer moins de droits aux français mahorais. Par exemple les minimas sociaux sont 50% inférieurs, alors que le coût de la vie est plus élevé. 80% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Mais ce régime dérogatoire s’applique aussi au droit des étrangers : par exemple le droit du sol est réduit à Mayotte, ainsi que certains droits à la régularisation. À cela s’ajoute les pratiques illégales de l’administration sur place, comme l’enfermement quotidien des mineurs isolés ou leur rattachement à des personnes inconnues pour les expulser.

Les luttes contre les politiques anti-migratoires et les luttes contre l’impérialisme et le colonialisme sont indissociables !

De Toulouse à Mayotte, solidarité avec toutes les personnes qui luttent contre le colonialisme et pour leur liberté !

À bas les CRA et les prisons ! À bas l’État raciste et colonialiste !

 

Offensive coloniale à Mayotte

L’opération « Wuambushu » à Mayotte prévue en avril après le ramadan a pour objectif la déportation de milliers de comorien.nes en 2 mois. Près d’un millier de gendarmes mobiles, de policiers et de CRS 8 vont débarquer en renfort pour détruire 10% des cases et vont expulser plus de 250 personnes par jour vers les autres îles de l’archipel des Comores.
Les structures de soins doivent se tenir prêtes à soigner en urgence, les écoles prêtent à voir disparaitre des enfants, et en parallèle, le conseil départemental de Mayotte a voté l’interdiction de l’accès à la Protection maternelle et infantile (PMI) aux personnes étrangères non couvertes par la sécurité sociale.

Domination coloniale et françafrique
Mayotte est restée illégalement territoire français à l’indépendance des îles des Comores en 1974. L’ONU considère comme nul et non avenu le referendum de 1976, condamne la présence de la France à Mayotte et demande son retrait. Au fil des ans, une vingtaine de résolutions de l’ONU ont suivi dans ce sens. En parallèle, l’ingérence de la France après l’indépendance des Comores, avec notamment l’intervention du mercenaire Bob Denard (assassinats de présidents, coups d’État…) va être à l’origine de la déstabilisation et de la paupérisation des Comores qui pousseront les comorien.nes au fil des ans à émigrer (1).

Le visa Balladur responsable de milliers de morts
Seulement 75 km séparent Mayotte de l’île de Ndzouani aux Comores.
Depuis 1995, la France a instauré un visa obligatoire pour les Comorien.nes qui veulent rejoindre Mayotte. C’est la fin de la libre circulation au sein de l’archipel, c’est la création d’une immigration dite « irrégulière ». Avant qu’il soit instauré, les familles étaient éparpillées dans l’archipel et le cabotage d’une île à l’autre était quotidien.
Depuis l’instauration de ce visa plus de 20 000 personnes sont décédées en tentant la traversée. Les personnes se rendent à Mayotte dans des embarcations de fortune, les kwassa. 15 à 20% des étrangers à Mayotte seraient en situation dite irrégulière, situation créée par la fermeture des frontières en 1995. Près de la moitié de la population de Mayotte ne possède pas la nationalité française, mais un tiers des étrangers sont nés à Mayotte et 95% des étrangers sont comoriens.

A Mayotte l’expulsion est toujours industrielle
En dehors de l’opération « Wuambushu » , l’État fixe à la préfecture des objectifs d’expulsion de 30 000 personnes par an, c’est à dire près de 10% de la population de Mayotte (280 000 habitants officiellement). Ces expulsions de masse s’apparentent à des transferts forcés de population qui constituent un crime contre l’humanité, selon le code pénal.
Mayotte, représente la moitié des expulsions et enfermements dans les CRA du territoire français. Et celles qui ne sont pas expulsées constituent une main d’œuvre exploitée.

Plus de 2000 enfants ont été enfermés au CRA de Mayotte en 2020 (plus de 3000 en 2019), c’est à dire plus de 15 fois plus que dans l’hexagone, sans compter les enfants enfermés en locaux de rétention administratif (LRA), dont les chiffres ne sont pas communiqués.

Il n’y a qu’une seule préfecture (Mamoudzou) qui traite l’ensemble des demandes de titre de séjour, et des demandes d’asile. Les délais de traitement sont très longs pour les demandes de titre, entre 18 mois et 2 ans.

Omniprésence de la police et des contrôles
A Mayotte, les agents interpellateurs de la police aux frontières (PAF) sont partout, les arrestations sont massives. La pression exercée par la police est telle que des mineurs n’osent plus aller à l’école, des personnes ne vont pas se faire soigner à cause des contrôles à proximité de l’hôpital, etc. Pour faire des vérifications d’identité, les flics s’assoient sur les lois, rentrent dans les maisons sans autorisation, sortent les personnes à moitié nues, etc.

Le CRA de Pamandzi
Il n’y a pas de statistiques détaillées qui proviendraient des associations à l’intérieur des CRA comme c’est le cas ailleurs en France. Pour Mayotte, on ne dispose que des chiffres transmis par la PAF.  L’enfermement au CRA à Mayotte représente à lui seul la moitié de l’enferment dans les CRA en France. Par exemple en 2019, il y a eu près de 27 000 enfermements à Mayotte sur 53 000 au total.
En 2021 : 26485 pour Mayotte uniquement. Cela signifie que 62,5 % des placements en rétention décidés par l’administration française en 2021 l’ont été pour Mayotte par la mise en place de l’opération Shikandra de lutte contre l’immigration clandestine depuis 2019.

Les procédures d’expulsions se font le jour même de l’interpellation L’immense majorité des personnes étrangères est expulsée dans la journée, la durée moyenne de rétention est de 17 heures, ne laissant ni le temps ni la possibilité d’exercer ses droits. D’ailleurs, parmi la petite minorité qui est vue par l’association qui traite les dossiers juridiques dans le CRA, (1600 personnes sur 14000 en 2020, 3500 sur 27000 en 2019) et qui ont donc le temps d’exercer leurs droits, les deux-tiers sont libérés par les juges administratifs et judiciaires, où par la préfecture elle-même.

Régime dérogatoire et pratiques illégales
Il y a 3 niveaux de discriminations pour Mayotte : le droit d’exception qui est régi par le CESEDA (code d’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) comme pour l’ensemble de la France, le régime dérogatoire qui est propre à Mayotte qui diminuent les droits des étranger·es et des Mahorais .e.s (régime dérogatoire article 73 de la constitution) et viennent se rajouter les pratiques illégales de l’administration

Pratiques illégales ordinaires de l’administration
La loi interdit l’enfermement administratif des mineurs non accompagnés et leur expulsion.
– Tous les jours, des mineurs non-accompagnés sont placés au CRA comme majeurs après que l’administration leur attribue une date fictive de naissance et considère les actes de naissance des comoriens comme faux ou falsifiés.
– Toutes les semaines, d’autres mineurs sont rattachés arbitrairement à un tiers lors des interpellations maritimes et terrestres, pour permettre leur rétention et leur expulsion.
– De plus en plus de femmes sortant de la maternité sont enfermées au CRA avec leur nourrisson. En 2020 un nourrisson a été enlevé à sa mère qui venait d’être arrêtée et donné à une passante qui l’a finalement déposé devant le CRA (rapport rétention Cimade).
– Régulièrement des mineurs français en possession d’une preuve de leur nationalité, sont placés en rétention pour les expulser illégalement avec leur parent étranger.
– La préfecture n’applique pas l’effet suspensif des référés liberté, pourtant inscrit dans la loi (qui bloquent normalement l’expulsion jusqu’à décision du juge)
– La préfecture ne respecte pas les injonctions au retour du juge des référés (quand il enjoint l’État à ramener sur le territoire des personnes expulsées illégalement) et préfère payer les amendes qui en découlent, ce qui rend les expulsions expéditives sans aucun recours effectif.
– Le greffe du CRA expulse des personnes malgré les mises en attente de la préfecture ou les décisions du TA. Un retard de 5 ans accumulé par la préfecture dans les dossiers qui met les personnes en situations irrégulières. Il arrive donc fréquemment que des personnes françaises ou ayant un titre de séjour ou des demandeurs d’asile se retrouvent au CRA

Droit dérogatoire
Le CESEDA, code d’entrée et de séjour des étrangers et du droit d’asile est déjà un code d’exception. Le droit des étrangers pour Mayotte est dérogatoire de ce droit général des étrangers : il y a des spécificités pour Mayotte qui diminuent les droits des étrangers et donc des comoriens.
Ce régime dérogatoire est un héritage de la colonisation : la constitution de 1958.
– Il réduit  le droit du sol, le droit à la régularisation, le droit d’asile et le droit à l’obtention du DCEM, Document de Circulation pour Étranger Mineur.
– Il n’y a pas d’Aide Médicale de l’État (AME) à Mayotte ni  d’accès aux soins pour les sans-papiers.
– Concernant les LRA, le CESEDA stipule un certain nombre d’équipements mais pas pour Mayotte. Le CRA ne suffisant pas en capacité à l’enfermement, création de LRA. en 2020 et 2021, les arrêtés de création de LRA sont quotidiens ou quasi quotidiens, et transforment en LRA pour une journée un local, une salle. Les personnes enfermées en LRA sont privées d’accès à leur droit : accès impossible à une association, un conseil voire un téléphone. Beaucoup de parents d’enfants français ont été expulsés illégalement depuis des LRA.

Inégalités des droits
Le régime dérogatoire permet l’inégalité des mahorais français par rapport aux français de métropole. Les droits sociaux des mahorais sont très inférieurs à ceux des habitants de la métropole ou des autres colonies.
– Le SMIC et le RSA sont bien inférieurs (actuellement 7,91€ au lieu de 10,48€ en métropole et autres DOM) (actuellement de 282€ au lieu de 565€ en métropole, inférieur de 50%)
– Il n’y a pas de Complémentaire santé solidarité à Mayotte

Inégalités et pauvreté
Plus de 90% des habitants vivent sous le seuil de pauvreté, sur une île où les prix sont plus élevés : le coût de la vie est élevé car la plupart des produits sont importés. Il y a surtout des inégalités de revenus en fonction de la couleur de la peau :  en moyenne les revenus sont de 200€ mensuels pour les étrangers, 300€ pour les français originaires de Mayotte, 1400€ pour les français non originaires de Mayotte. C’est typiquement une structure sociale inégalitaire issue de l’histoire coloniale. La grande majorité de la population vit dans des logements précaires ou insalubres, il s’agit souvent d’abris de fortune, sans accès à l’eau, à l’énergie et sans assainissement.
Les étranger.es, les comorien.nes essentiellement, sont pointés comme la source de tous les problèmes par l’État français et les élites mahoraises.

La chasse aux étrangers s’organise
Des milliers d’habitations sont détruites chaque année laissant les personnes à la rue. Depuis 2016, des collectifs se sont organisés pour déloger et agresser leurs voisins qui sont des étrangers avec ou sans papiers et qui habitent un terrain qu’ils louent. Ces collectifs ont été escortés par les flics. Depuis l’État a pris le relai de ces meutes xénophobes en démantelant lui-même les quartiers pauvres. Les personnes construisent des bangas sur des terrains et ensuite la préfecture décide que tout un quartier est insalubre et vient le détruire sans respecter évidemment la Loi Elan qui veut qu’on reloge les personnes.

Pourquoi l’État français tient tant à conserver Mayotte ?
Il s’agit d’enjeux économiques et géostratégiques : Mayotte est sur la route du Cap par laquelle est acheminée le pétrole du moyen orient vers les pays occidentaux, le canal du Mozambique. Des découvertes d’importantes réserves de pétrole et de gaz dans le canal du Mozambique, c’est à dire entre le Mozambique et Madagascar, conserver Mayotte permet également à la France d’agrandir sa zone économique exclusive en mer (1)

(1) : L’œuvre négative du colonialisme français à Mayotte : Un îlot de pauvreté dans un océan de misère

« Ici je pense tous les jours où je vais mettre un drap pour me pendre »

Le témoignage de B. illustre les violences médicales et psychologiques ainsi que le déni de soin que subissent quotidiennement les personnes enfermées dans les centres de rétention. Ce n’est pas le premier témoignage de refus de soin et de maintien d’une personne enceinte en rétention à Toulouse, lire ici le récit de V enfermée malgré l’incompatibilité de son état avec l’enfermement. Il s’ajoute à une longue liste de témoignages de détresses psychologiques, d’usage de psychotropes distribués par le médecin du centre pour assommer les personnes ou d’absence de soins dans des cas de blessures graves.  Les tentatives de suicide sont nombreuses. Ici le récit concernant une personne qui s’est suicidée à  Bordeaux suite à l’absorption  d’anxiolytiques et de somnifères distribués par le médecin.

B. mentionne aussi son interdiction de territoire français (ITF) à vie et son enfermement en CRA alors qu’elle n’est pas expulsable. Cela répond à la même logique selon laquelle les Algérien·nes continuent d’être enfermé·es  en ce moment alors que l’Algérie ne délivre explicitement aucun laisser-passer. Le CRA n’est pas qu’un rouage de la logique de déportation des étranger·es, mais c’est aussi un outil de répression envers celleux qui ne peuvent pas être expulsée·es. Il s’agit de les obliger à s’invisibiliser, à se soumettre aux conditions de travail les plus pourries, voire à partir sans faire de bruit lorsque les patrons refusent de payer les personnes embauchées au black.

Mais partout les prisonnier·es se mutinent et résistent malgré tout ! Récemment, il y a eu des évasions (à Sète et à Oissel), des grèves de la faim à Holsbeek en Belgique, de la résistance collective à Toulouse… Partout dans le monde, à bas les frontières, feu aux CRA et crève la taule !

« Je suis Rrom avec une carte « gens du voyage », je suis en France depuis que je suis petite, depuis que j’ai 4 ans, ils veulent m’expulser en Bosnie mais je ne connais personne là-bas. Le seul pays que je connais c’est la France. Je suis sortie de prison de Marseille, ils m’ont mise ici, c’était ma phobie de venir ici, c’est pire que la prison.

On devient fous ici, quand on sort d’ici on peut exploser dehors et faire n’importe quoi tellement ça rend fou ici. Ils m’ont mis une interdiction à vie (Interdiction de Territoire Français – ITF). Pourquoi à vie ? Même les gens qui tuent on leur donne pas une interdiction à vie. Ils m’enferment ici pour me punir en plus de la prison. Il restait 3 mois en prison que j’ai pas fait, ils veulent me les faire payer ici. Ils m’ont enlevé mes enfants, y’en a un en foyer et 2 dans des familles d’accueil, je ne peux même pas leur parler. C’est compliqué, je ne sais pas comment faire, je n’ai pas eu d’aides pour tout ça.

Je suis ici depuis presque un mois, il y a une fille de 21 ans, elle ne parle pas français, elle est enceinte de 5 mois, elle est malade, elle vomit, elle saigne, je peux pas la laisser comme ça, ça me fait de la peine. J’ai appelé la sage-femme de l’hopital pour qu’elle appelle le médecin du CRA. Je ne sais pas ce qu’il a fait.
Ils l’ont emmené à l’hopital parce qu’elle avait un RDV d’avant, ils ont dit qu’elle a le diabète, ils l’ont ramenée au centre, ils vont l’expulser le 12 avil. C’est pas possible de laisser une femme enceinte dans ce centre.
C’est invivable ici, j’ai demandé de voir un psychologue, je me sens pas bien, il va pas venir, je sais pas pourquoi, ils font n’importe quoi avec les gens.

J’ai peur la nuit ici, il y a du bruit. Ils veulent que les gens se suicident, depuis que je suis ici j’ai des idées noires tous les jours, ils vont me rendre folle. J’ai passé 24 mois en prison, j’avais des idées noires quand je pensais à mes enfants, à ma mère mais ici c’est tous les jours les idées noires, je pense tous les jours où je vais mettre un drap pour me pendre. »

Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi 18 mars contre les violences d’Etat, le racisme sytémique et les frontières

Beaucoup de monde mobilisé ce jour à Toulouse, contre les violences d’Etat, le racisme systémique, les frontières et notamment contre le projet de loi Darmanin anti-immigration

L’organisation a été portée par des collectifs féministes, anticolonialistes, antifascistes, antiracistes, des réseaux de soutien aux personnes sans-papiers, des collectifs en lutte contre les violences et crimes d’État et contre les frontières.

 

Prise de parole du collectif Toulouse Anti CRA :

Il y a les violences d’État que subissent les personnes étrangères. Elles sont traquées partout : aux frontières, au travail, dans la rue. Elles doivent quotidiennement se confronter à la police et aux politiques racistes mises en place depuis des années contre les immigrées. Ces violences d’État sont héritées des pratiques coloniales et du code de l’indigénat : la limitation de circulation, l’enfermement administratif et les déportations.

Les personnes sans papiers peuvent être arrêtés et se retrouver en centres de rétention administrative, les CRA. Le CRA de Toulouse Cornebarrieu est situé au bord des pistes de l’aéroport et 126 personnes peuvent y être enfermées. Dans ces prisons pour étrangers et étrangères, les personnes sont enfermées jusqu’à 3 mois en vue d’être expulsées. Mais toutes les personnes ne sont pas expulsables, et l’enfermement poursuit aussi un autre objectif qui est de punir et soumettre une partie de la population, de mater les personnes afin qu’elles s’invisibilisent et qu’elles ne se rebellent pas face aux patrons qui les exploitent.

Il y a près de 50 000 personnes enfermées par an sur l’ensemble du territoire, dont plus de la moitié à Mayotte, territoire colonial et lointain où la violence d’État se déchaîne.

À l’intérieur des CRA, les personnes ont faim, elles subissent quotidiennement des provocations, des humiliations, des insultes racistes, des refus de soin, et des violences policières. Des personnes se suicident, les CRA tuent. En septembre 2018, Karim, 31 ans, s’est pendu dans sa chambre au CRA de Toulouse suite à la prolongation de son enfermement par le juge.

Les prisonnières et prisonniers des CRA luttent quotidiennement contre l’enfermement et contre l’expulsion, que ce soit par des évasions, des incendies, des grèves de la faim et des refus de vol. Les personnes qui se rebellent et luttent sont régulièrement envoyés à la maison d’arrêt de Seysses après un passage au commissariat. Les allers-retours entre CRA et prison sont en augmentation. À Toulouse, de nombreuses personnes se retrouvent en circuit fermé entre le CRA et Seysses.

Depuis plusieurs années, l’État renforce la double peine, où il s’agit d’expulser un maximum de personnes qui ont été condamné à de la prison. Les personnes étrangères, plus contrôlées, plus judiciarisées et condamnées à des peines plus sévères représentent 25% des prisonnières et prisonniers. Cette justice de classe et de race qui enferme les pauvres, les personnes racisées et les personnes étrangères s’appuie sur un arsenal juridique de plus en plus répressif et une augmentation des lieux d’enfermement.

L’État est en train de construire de nouveaux CRA partout sur le territoire, en 2027 le nombre de places aura triplé en 10 ans. Il construit aussi partout de nouvelles prisons, avec 15 000 nouvelles places d’ici 2027. Il y a à Toulouse le projet d’une nouvelle maison d’arrêt, à Muret, en plus de celle de Seysses.

Ces violences d’État s’exercent aussi aux frontières. La France et l’Europe sont responsables de milliers de morts chaque année en Méditerranée, dans la manche, au large de Mayotte. C’est l’occasion d’un business juteux pour les multinationales du militaire et du sécuritaire. L’Europe renforce en ce moment ses dispositifs anti-migratoires.

En France, le projet de loi raciste de Darmanin sur l’immigration est discuté au parlement. L’objectif est de durcir la condition des immigré·es, de renforcer l’exploitation des travailleurs et travailleuses avec des titres de séjour précaires. Cette loi permettra de réprimer et de criminaliser davantage celles et ceux qui ne seront plus utiles aux patrons, qui ne se soumettront pas aux « valeurs de la République » ou qui représenteront une « menace à l’ordre public » selon les préfectures. Au final, cette loi permettra d’enfermer davantage en CRA et d’expulser encore plus facilement. Mais Il s’agit de la 30e loi anti-immigration en 40 ans et ce n’est pas seulement contre elle mais contre toute la politique migratoire de l’État qu’il faut lutter.

Solidarité avec toutes les personnes immigrées ! Solidarités avec les prisonniers et prisonnières en lutte dans toutes les prisons !

Mobilisons-nous contre les violences d’État, le racisme systémique et les frontières !

MANIFESTATION SAMEDI 18 MARS A TOULOUSE
DÉPART A 15H DE PALAIS DE JUSTICE SUIVI D’UN RASSEMBLEMENT PLACE ARNAUD BERNARD

Cette marche a été initiée en France en 2011 par les familles de personnes assassinées, blessées et mutilées, pour faire de la mi-mars le moment de convergence de toutes les personnes victimes de violences et de crimes d’État. Nous manifestons à Toulouse notre soutien et notre solidarité aux familles de Dine, Jaouad et Good assassinés par la police à Albi, à Seysses et à Béziers.

Dans un contexte de fascisation de l’Etat et de diffusion des idées d’extrême-droite dans les discours politiques et médiatiques, nous nous mobilisons pour dénoncer les violences et crimes d’Etat : de la police, de la justice, des lieux d’enfermement et des frontières.

Ces violences systémiques s’inscrivent dans la continuité des violences racistes colonialistes, subies en premier lieu par les habitant·e·s des territoires ultramarins et des quartiers populaires. Nous nous mobilisons contre le racisme d’Etat, dans la continuité des combats antiracistes et populaires, et affirmons la centralité de la lutte antiraciste dans la lutte antifasciste.

La répression d’Etat et son arsenal juridique augmentent avec des lois racistes et islamophobes : loi contre le port du voile, loi séparatisme, loi sécurité globale et aujourd’hui la loi Darmanin. Les frontières font aussi partie de ce système raciste et sont la cause de milliers de morts chaque année. La France, avec cette future loi Darmanin, veut durcir une fois de plus ses lois contre les immigré·es, augmenter les enfermements en centres de rétention et les expulsions.

Les organisations antiracistes et anticoloniales subissent des dissolutions massives et des pratiques d’intimidation législatives, policières et politiques.
A Toulouse par exemple, le Collectif Palestine Vaincra lutte depuis plus d’un an contre le ministère de l’Intérieur qui a décidé sa dissolution mais aussi contre la mairie qui tente par tous les moyens d’interdire les activités du collectif.

Cette année nous portons l’organisation de cette journée à Toulouse avec des collectifs féministes, anticolonialistes, antifascistes, antiracistes, des réseaux de soutien aux personnes sans-papiers, des collectifs en lutte contre les violences et crimes d’État et contre les frontières.

 

Rassemblement devant le CRA de Toulouse

Dans le cadre des mobilisations nationales contre la loi raciste de Darmanin, qui prévoit d’exploiter d’avantage les travailleur·euses sans papiers, d’enfermer et d’expulser plus les étranger·es, des manifestations contre les CRA se sont déroulées dans plusieurs villes, le week-end du 18 février : Lyon, Paris, Marseille, Bordeaux, Nantes, Strasbourg.

A Toulouse, une trentaine de personnes se sont rassemblées devant le CRA de Cornebarrieu pour faire entendre leur solidarité avec les personnes qui y sont enfermées et qui subissent le racisme et les violences d’État. Elles ont passé de la musique et échangé par dessus les murs avec les prisonniers de plusieurs secteurs avant l’arrivée des gendarmes.

A l’intérieur, quand les prisonniers sont sortis dans les cours de promenade pour crier avec les manifestant·es et danser sur la musique, les flics sont ensuite venus équipés de matraques et de gaz pour les empêcher de communiquer avec l’extérieur et les faire entrer dans le bâtiment.

Solidarité avec les prisonnier·es en lutte !
Solidarité avec toustes les immigré·es !
A bas les CRA et les frontières !

Si je meurs devant eux, ils s’en foutent

Les flics répriment violemment les prisonniers au CRA de Toulouse

Les prisonniers et prisonnières du CRA de Toulouse se révoltent régulièrement contre la condition qui leur est faite, mais leurs résistances comme la répression qu’ils subissent sont invisibilisées. Récemment, tous les prisonniers d’un bâtiment ont foutu le bordel pour exiger la prise en charge à l’hôpital de l’un des leurs, sans succès. Quelques jours auparavant, suite à un refus collectif de plateau dans un des secteurs du CRA de Toulouse, des prisonniers ont été désignés comme meneurs par les flics puis placés au mitard et frappés. Les policiers ont ensuite porté plainte contre l’un deux, heureusement sans suite pour cette fois. Mais les violences physiques et psychologiques des flics de la PAF sont quotidiennes, et les placements au mitard ou en taule fréquents.

On était à la cantine, au diner. On a dit aux policiers : « on mange pas, c’est de la mauvaise nourriture. On a faim. Pourquoi on ne peut pas prendre du pain et des yaourts dans les chambres pour manger la nuit quand on a faim ? Y’a qu’ici que c’est comme ça, c’est bizarre. » On a tous crié pour dire qu’on était pas bien et un policier m’a demandé à moi : « pourquoi tu parles toi, à cause de toi, tout le monde crie. » Et alors ils nous ont mis à quatre au mitard. Ils ont tapé deux collègues. Y’en a un qui a eu des traces sur le corps. Ils lui ont mis des coups de poings et des coups de pieds à la tête dans le couloir.

Même si on mange pas, ou si on fait la grève de la faim, ils s’en battent les couilles. Ils savent qu’on a pas de papiers, donc on compte pas. Si je meurs devant eux, ils s’en foutent. Le centre de Toulouse c’est le pire. On a des boutons, on se gratte, on leur a dit. Normalement si quelqu’un a des boutons, tu le laisses pas avec les autres, n’importe qui peut attrapper ça après. J’ai dit au policier qu’ils avaient pas le droit de laisser les gens avec les boutons et qui se grattent. Lui il m’a répondu que non, c’est rien. Ils savent qu’on peut rien faire. Ils savent qu’à la fin c’est eux qui gagnent.

Les copains ils ont pas porté plainte. Moi ils m’ont mis au mitard et ensuite en garde à vue. Les policiers ont porté plainte contre moi, comme quoi j’ai insulté les policiers et comme quoi j’ai dit aux autres on fait ça et ça, genre c’est moi le responsable. L’avocate leur a dit que c’était pas normal de me mettre au mitard et en garde à vue. Et le procureur a dû me laisser repartir, j’ai rien eu.

Les policiers dans leur tête ils vont m’envoyer en prison. Comme un collègue, il a rien fait, il a juste parlé, il a pris 6 mois ! J’étais choqué, il a rien fait ! Le pauvre il s’est embrouillé avec une policière qui travaille là. Lui genre il a pas parlé avec elle au début. Il parlait avec nous et il a dit genre un gros mot. Elle est venue et, comment dire, ici ils provoquent les gens pour que tu parles et tout. Elle l’a insulté, des insultes de fou. Elle a fait un dossier et les autres policiers sont venus avec elle. Elle a pris le visage de notre collègue dans ses mains
avec ses ongles, elle l’a griffé sur son visage. Après ils l’ont emmené au mitard. Ensuite il nous a appelé sur la cabine pour nous dire qu’ils lui avaient mis 6 mois de prison.

Ici tu parles avec les policiers et ça y est, ils veulent t’envoyer en prison. Tu peux rien faire, rien dire, ils disent « ici c’est moi qui décide ». On a pas de droits.

 

Mobilisons-nous contre le projet de loi Darmanin, une nouvelle loi raciste pour expulser davantage les immigré·es !

Les lois migratoires répressives se suivent et s’empilent, c’est la 30ème loi en 40 ans, son projet est de renforcer l’exploitation, la soumission et la répression des étranger·es.

Cette loi vient alimenter le Code d’entrée et de séjour des étrangers et du droit d’asile, le CESEDA, code d’exception, raciste et sexiste, hérité de l’idéologie coloniale et des codes d’exception, comme le Code de l’Indigénat, qui organisait le contrôle des « indigènes » dans les colonies avec entre autres la limitation de circulation, l’enfermement administratif et la déportation.

Comme d’habitude, le gouvernement se revendique d’un équilibre humaniste. En réalité, cet équilibre signifie renforcer l’exploitation des travailleur·euses immigré·es pour donner des gages aux patrons d’une part, et de l’autre réprimer et criminaliser davantage celles et ceux qui ne rentrent pas dans les bonnes cases, pour contenter l’extrême droite. Les nouveaux titres de travail encore plus précaires que les précédents vont de pair avec l’augmentation du nombre de place en centres de rétention administrative (CRA). Le renforcement de la répression accentue la pression sur les personnes sans papier, contraintes d’être exploitées sous peine d’être arrêtées, enfermées et expulsées.

Pour favoriser l’exploitation des personnes sans papier, le gouvernement annonce la création d’une carte de séjour temporaire « métiers en tension », les personnes déjà employées dans ces métiers depuis plusieurs mois pourront être régularisées automatiquement et pour une durée d’un an. Mais ce titre implique non seulement de conserver le même emploi, mais peut aussi ne plus être renouvelé si le métier en question sort de la liste « en tension ». Et les personnes seront alors susceptibles d’être expulsées. Il s’agit donc d’organiser le contrôle d’étranger·es corvéables puis expulsables, asservis aux besoins en main-d’œuvre du patronat.

Cette réforme fait partie de la guerre aux pauvres que le gouvernement mène depuis des mois – réforme du chômage, loi anti-squat, réforme des retraites … et maintenant loi anti-migrant. Les métiers « en tension » sont en effet sans surprise les secteurs qui peinent à recruter car les conditions de travail et les salaires y sont pourris. Ce sont donc des emplois en bas de l’échelle sociale, non qualifiés, et qui ne donnent accès qu’à des titres de séjour précaires.
Dans le même temps, des personnes qualifiées peuvent obtenir des titres de séjour pluriannuels sous certaines conditions, mais dans les deux cas, on est bien dans un système impérialiste de pillage de la main d’oeuvre de pays plus pauvres, en fonction des besoins du moment.

Dans le domaine du soin, l’intention est de pallier au délabrement du système de santé mais sans avoir à répondre aux revendications des personnels mobilisés depuis trois ans ou au malaise dans les hôpitaux. La loi prévoit une carte de séjour pluriannuelle spécifique aux professionnels de santé, mais qui les maintient comme aujourd’hui dans la précarité : sans reconnaissance des diplômes, pour des salaires moindres et à des postes spécifiques, mobiles sur tout le territoire.
La France profitera cette fois encore d’une main d’œuvre qualifiée, bon marché, formée aux frais des pays d’origine, essentiellement d’Afrique subsaharienne et du Maghreb qui manquent déjà de médecins.

Dans un contexte où les arguments de l’extrême droite sont tranquillement repris par le gouvernement, l’obsession assimilationniste s’intensifie et de nouveaux obstacles à la régularisation apparaissent : il ne faudra plus simplement suivre des cours de français mais justifier de sa maîtrise.
D’autre part, la loi prévoit d’imposer à celles et ceux qui obtiennent un titre de séjour de « respecter les principes de la République et de rendre possible le refus, le retrait, ou le non-renouvellement de certains titres de séjour pour des nouveaux motifs liés à son comportement ». Ce fourre-tout sans contours des principes accroît encore le pouvoir discrétionnaire de la préfecture.
Mais derrière ces formulations vagues, ce sont avant tout les musulman·es qui sont encore ciblé·es par ce projet, cette loi est un pas de plus dans la mise en œuvre d’une islamophobie d’État.

Pour celles et ceux qui ne pourraient bénéficier des nouveaux titres de séjour liés au travail, la répression s’accentue et le gouvernement entend enfermer et expulser davantage les personnes sans papier en faisant sauter les quelques freins légaux existants.
Et il commence par s’attaquer aux quelques catégories protégées par la loi : parent d’enfant français, résident de plus de vingt ans, etc.
Désormais, les préfectures pourront passer outre en invoquant la « menace grave pour l’ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l’État », encore des notions suffisamment vagues pour laisser libre cours à l’interprétation.
De plus, cette « menace » permettra également de retirer ou de ne pas renouveller un titre de séjour. Dans le même temps, le nombre de recours pour contester son expulsion sera divisé par trois.

Toujours pour satisfaire l’extrême droite, Darmanin a annoncé partout qu’il remettait en place la double peine (les personnes étrangères sont doublement sanctionnées puisqu’en plus de la peine d’emprisonnement, elles sont expulsées).
Celle-ci n’a en réalité jamais disparu et depuis plusieurs années déjà, l’Etat accentue la pression sur les personnes étrangères emprisonnées pour augmenter leur enfermement au CRA et leur expulsion.
Plus largement, il criminalise les personnes sans papiers visées par une mesure d’expulsion, en projetant de les inscrire systématiquement dans le fichier de police des personnes recherchées.

Dans le même temps, pour pouvoir enfermer toujours plus d’étranger.es, le parlement vient de voter le passage à 3000 places en CRA d’ici 2027, soit un triplement par rapport à 2017. Pour rappel, ce sont près de 50 000 personnes par an qui sont enfermées en France dans ces prisons pour étranger.es.

Des mobilisations contre la loi Darmanin et contre les frontières s’organisent en février et mars sur tout le territoire.
A Toulouse, une date est déjà fixée pour une manifestation le 18 mars, journée nationale de lutte contre les violences d’État. Infos à venir.

Soutien à tous·tes les immigré.es !
Pour en finir avec les frontières et leurs prisons !