« ils m’ont attaché les pieds, les cuisses, ils m’ont menotté derrière le dos, ils m’ont mis un casque sur la tête et ils m’ont emmené jusqu’à l’aéroport »

Témoignage de T le 12 mai 2022 :

« Je suis au lycée, j’ai 18 ans, je suis en première à Pamiers. Ils m’ont arrêté le 3 mai par l’assignation à résidence, je signais au commissariat et le dernier jour, ils m’ont arrêté. Sur place ils m’ont embarqué. J’ai toute ma famille ici, ma mère, ma soeur, mon frère, mes oncles et je me retrouve quand même au centre. »

Le 27 mai, la PAF l’emmène pour l’expulser :

« Ce qu’ils ont fait, ça va rester dans ma tête à vie…
Ils sont venus me chercher à 3 heures du matin. Ils m’ont dit, tu as 10 minutes pour te lever sinon on va te lever de force et t’emmener de force. J’ai dis « ok », je me suis habillé et je leur ai dit « ça vous sert à quoi de m’emmener si je n’ai pas de famille au Gabon, j’ai personne au Gabon pour m’accueillir, je serai un clochard là-bas ? ». Ils m’ont dit « c’est pas notre problème ».
Après ça, ils m’ont emmené à l’accueil, ils m’ont fouillé, ils m’ont tout fait. Après ça, ils m’ont attaché les pieds, les cuisses, ils m’ont menotté derrière le dos, ils m’ont mis un casque sur la tête et ils m’ont emmené jusqu’à l’aéroport et jusqu’à l’aéroport je continuais de me débattre, je me disais j’ai pas envie de partir, même si je vais en prison, toute ma famille est ici, c’est le plus important pour moi.

Après ça, ils m’ont emmené avec brutalité dans l’avion, ils ont commencé à me mettre des chaussettes dans la bouche pour m’empêcher de crier, je disais, « lâchez-moi, j’ai personne au Gabon, j’ai rien, toute ma famille est en France ». Ils ont commencé à m’étouffer, à m’étrangler. Ils ont tout fait pour ne pas que je crie. Du coup il y avait une autre personne à côté de moi, qu’ils ont embarqué aussi, elle a commencé à crier avec moi, ils ont commencé à l’étrangler, à l’étouffer aussi, pour ne pas qu’on crie en fait.

Après ça l’hôtesse de l’air a décidé qu’on n’embarque pas. Les passagers dans l’avion étaient terrifiés, c’est eux qui ont dit à l’hôtesse de l’air de dire au pilote de ne pas nous embarquer. L’autre personne qu’ils voulaient expulser est dans ce centre aussi, comme moi. C’était un vol pour Paris. Ensuite de Paris j’avais un vol pour le Gabon. Ils m’ont ramené au CRA, à quoi ça me sert puisque j’ai pris 3 mois de prison avec sursis et 5 ans de mise à l’épreuve. Quand on est descendus de l’avion, ils m’ont emmené en garde à vue à au commissariat de l’aéroport pendant 4 ou 5 heures et ensuite directement à l’audience, au tribunal.

J’ai expliqué pourquoi j’ai pas pris l’avion. Ils m’ont mis 3 mois de prison pour refus d’embarquer, alors que ce n’est pas moi, c’est le pilote qui a décidé de nous faire descendre de l’avion. Et maintenant je suis encore au CRA. Ils m’ont expliqué que si je refuse le prochain avion, je pars en prison pour faire les 3 mois. La préfète, elle va reprogrammer un autre vol, je vais le refuser et je vais faire les 3 mois de prison, c’est ça.
Même l’ambassade du Gabon ne veut pas faire de laisser-passer mais vu qu’ils ont mon passeport, ils font tout ce qu’ils veulent.
Ma prof est venue me voir, elle a fait des manifestations devant la préfecture, elle a envoyé des dossiers à la préfecture et la préfecture de Foix veut rien entendre. Ils ne prennent pas en compte ma situation familiale. Le tribunal a refusé d’annuler mon OQTF.

Ce qu’ils m’ont fait je peux pas l’oublier :  ils m’ont étranglé, étouffé, ils m’ont mis des trucs dans la bouche et un casque sur la tête ! »